Le Grillon.
Un pauvre petit grillon
caché dans l' herbe fleurie
regardoit un papillon
voltigeant dans la prairie.
L' insecte ailé brilloit des plus vives couleurs ;
l' azur, le pourpre et l' or éclatoient sur ses ailes ;
jeune, beau, petit-maître, il court de fleurs en fleurs ;
prenant et quittant les plus belles.
Ah ! Disoit le grillon, que son sort et le mien
sont différents ! Dame nature
pour lui fit tout et pour moi rien.
Je n' ai point de talent, encor moins de figure ;
nul ne prend garde à moi, l' on m' ignore ici bas :
autant vaudroit n' exister pas.
Comme il parloit, dans la prairie
arrive une troupe d' enfants ;
aussitôt les voilà courants
après ce papillon dont ils ont tous envie.
Chapeaux, mouchoirs, bonnets, servent à l' attraper.
L' insecte vainement cherche à leur échapper,
il devient bientôt leur conquête.
L' un le saisit par l' aile, un autre par le corps ;
un troisieme survient et le prend par la tête.
Il ne falloit pas tant d' efforts
pour déchirer la pauvre bête.
Oh ! Oh ! Dit le grillon, je ne suis plus fâché ;
il en coûte trop cher pour briller dans le monde.
Combien je vais aimer ma retraite profonde !
Pour vivre heureux vivons caché.
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Marie de France.
M
arie de France naquit en France, comme l'indique son nom ; mais
elle a laissé ignorer dans quelle province elle avait reçu le jour.Cette femme est l'une des premières de son sexe qui aient fait des vers français, et occupe un rang distingué parmi les poètes anglo-normands, dans les écrits desquels on devait espérer ,de trouver quelques renseignements sur ce qui la concerne; mais tous, à l'exception de Denys Pyramus, qui d'ailleurs en dit peu de chose, ont gardé un profond silence sur cette muse, bien supérieure à son siècle par ses lumières, par ses sentiments et par le courage qu'elle eut de dire la vérité à des oreilles mal disposées ou peu accoutumées à l'entendre.>
Les premières productions de Marie sont une collection de lais en vers français qui renferment plusieurs histoires ou aventures galantes arrivées à de vaillants chevaliers. Ces lais, qui sont au nombre de quatorze, se trouvent avec la traduction en prose dans le premier volume du recueil des poésies de Marie de France, publié en 1820 par B. de Roquefort ; nous nous bornons à rapporter le prologue qui les précède.
Les fables de Marie, au nombre de cent trois, composées avec cet esprit qui pénètre les secrets du cœur humain, se font remarquer surtout par une raison supérieure, par un esprit simple et naïf dans le récit, et par une justesse fine et délicate dans la morale et les réflexions. On y retrouve cette simplicité de style particulière à nos romans anciens, et qui fait douter si La Fontaine n'a pas plutôt imité notre auteur que les fabulistes d'Athènes et de Rome.
La dernière production de Marie de France est le conte du Purgatoire de Saint-Patrice, traduit du latin et mis en vers français.
Les fables de Marie proviennent second volume du recueil de M. de Roquefort.
Ensi est-il n'en dutez mie;
Mult s'entremet de grant folie
Q'à plus fort de lui s'acumpaigne ;
Ni puet faire pas grant gaaigne.
Dou Lion qui a la chacier od la Chièvre et la Brebis.
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